Jakob Guanzon

Jakob Guanzon : « Même des personnes qui ont un travail stable se sentent écrasées par le poids constant de l’argent »

À l’occasion du Festival America, Jakob Guanzon, l’auteur d’Abondance paru en janvier 2023 à La Croisée dans une traduction de Charles Bonnot, a accordé un entretien à Zone Critique. Son premier roman, finaliste du National Book Award, met en scène un père et son fils sans abri qui, en vingt-quatre heures, dans une Amérique ultra-consumériste décrite dans un style saturé contrastant avec le dénuement des deux héros, voient leur vie basculer.

Abondance, Jakob Guanzon

J’ai lu que c’est la structure du livre (ces titres de chapitres indiquant quelle quantité d’argent possède alors Henry) qui vous est venue en premier. A-t-il été facile d’élaborer une histoire en vous appuyant sur ce découpage ?

Le procédé m’a beaucoup intéressé parce que la plus grosse expérience pour moi en tant qu’écrivain était d’observer comment l’argent affecte le personnage. Au début, je choisissais les montants un peu au hasard.
J’aime planifier mes romans, je sais où l’histoire va : je savais avant de commencer à écrire quelle serait la dernière phrase d’Abondance. Mais est venu un moment dans le livre, à la moitié, peut-être un peu plus, où j’ai réalisé que Henry devait gagner un peu d’argent, trouver un travail quelconque, sans doute manuel. Ça a perturbé mon plan initial. Ça m’a montré à quel point le poids d’un budget très réduit force une personne à faire des choses qu’elle ne veut pas faire, n’a pas prévu de faire. 

Est-ce que vous pensez que la chance et la malchance jouent un rôle dans la vie de Henry ? Dans la vie des gens en général ?

Absolument, et ce dès notre naissance. Le fait de naître, bien sûr, mais aussi dans quelle famille nous naissons, la classe à laquelle elle appartient, notre race, notre genre, tout est une affaire de chance, de hasard, de coïncidences.
Ça dépend aussi de la manière dont nous réagissons dans une situation donnée. Nous avons notre libre arbitre, mais il dépend beaucoup des circonstances de notre naissance. 

Henry veut éviter de répéter les erreurs de son père, en particulier dans la manière dont il élève son propre fils. Pourtant, il marche dans ses pas, notamment dans le mélange de dignité, d’amour et d’abnégation dont il fait preuve. Sommes-nous condamnés à répéter les erreurs de nos parents, au moins dans la façon dont nous élevons nos enfants ?

Bonne question. Je ne pense pas qu’on soit « condamnés » à reproduire ces erreurs, mais je pense que c’est très dur de ne pas le faire. On internalise l’exemple donné par nos parents : tant de ce que nous connaissons du monde nous vient d’eux ou de notre enfance. S’ils ne nous montrent pas le bon exemple, c’est l’un des obstacles les plus ardus à surmonter si nous voulons devenir meilleurs. Parce que cet héritage fait partie de notre nature finalement, et résister à sa propre nature, c’est difficile. 

Vous pensez donc que ce que nous acquérons passivement pèse davantage sur la manière dont on vit et réagit que ce que nous acquérons consciemment ?

Je pense que ça dépend de qui nous sommes quand nous naissons, de ce que nous portons déjà en nous. Si nous naissons avec des qualités acceptées par la société, alors nous ne devrons pas vraiment lutter pour surmonter ce bagage. Mais si nous naissons avec certains instincts plus ou moins problématiques, ça devient difficile de résister à cette nature. Et ça demande alors une vraie force de caractère de prendre les bonnes décisions, de ne pas suivre cette nature, de se dire « je vais faire mieux. »

La manière dont Henry éduque son fils, ce mélange de dignité, de haine envers lui-même et d’amour pour Junior, est-ce ancré dans leurs origines philippines ?

Je pense qu’en Amérique, des familles blanches, noires ou latinos de la classe populaire sont similaires à ce que je dépeins, au moins en partie. Mais ces spécificités que vous décrivez – ce côté philippin traditionnel dont vous parlez très bien –, sont authentiques. De fait, j’ai vraiment pu me baser sur ma propre expérience pour enrichir le livre.
Les Philippins sont des gens drôles, la culture philippine est très joyeuse, mais en ce qui concerne la figure paternelle, c’est une figure dominante. 

Ce qui m’a frappé dans Abondance, c’est l’abondance de détails au sujet de l’environnement de Henry, des textures, des couleurs, mais aussi au sujet de ses propres sensations. Est-ce la manière que vous avez trouvée pour traduire le décalage entre l’abondance promise par la société de consommation et l’extrême pauvreté qui sourd de la vie quotidienne de Henry ?

Tout à fait, c’est une observation très juste. Je voulais écrire dans un style quasi-maximaliste pour mettre en valeur la surcharge sensorielle vécue par Henry. C’est typique, en tout cas dans les livres américains, d’écrire de manière très simple et épurée quand on parle de la pauvreté – et c’est très beau. Lucia Brown Berlin ou Raymond Carver capturent le dénuement dans leur style, ce qui est d’ailleurs logique narrativement parlant. Pourtant, parce que j’étais intéressé par le matérialisme de notre culture, je trouvais judicieux ici que la plume reflète cet aspect maximaliste de l’expérience. 

C’est pour cela que le roman commence dans un McDonald’s et s’achève dans un Walmart ?

Oui pour le Walmart. Pour le McDonald’s, je n’ai pas vraiment pensé au symbole : j’y ai travaillé étant plus jeune, et c’est là qu’on va pour manger. C’est comme si je n’y avais pas pensé parce qu’il n’y a rien d’autre aux États-Unis. On n’a pas de restaurants ou de cafés, mais des McDo.
On l’a souligné pendant ma première interview aux États-Unis et j’ai acquiescé, « oui c’est brillant, mais c’est un hasard ! » 

Dans quelle mesure votre livre fait-il écho à ce que vivent les gens aux États-Unis aujourd’hui ?

Ce qui très dur pour un auteur au début de sa carrière, c’est de déterminer qui sont ses lecteurs. J’écris depuis plusieurs années maintenant, mais j’ai toujours du mal parce qu’on suppose que nos lecteurs appartiennent au moins à la classe moyenne, sont diplômés, etc. Mais la réponse à ce livre qui m’a le plus touché vient de personnes qui travaillaient dur, avaient lu le livre, traversaient une période difficile de leur vie et qui m’ont écrit ces magnifiques messages, qui m’ont dit qu’ils s’identifiaient à Henry et retrouvaient leur propre expérience dans ce qu’il vivait. Et bien plus que n’importe quel prix ou que la gloire, c’est ce genre de messages qui donne sens à mon travail d’écrivain. 

Votre roman reflète donc réellement ce que vivent ces gens, en particulier en ce moment avec l’inflation et les problèmes économiques ?

Ici, il est question d’extrême pauvreté, et ça existe aux États-Unis, bien sûr. Mais je pense que même des personnes qui ont un travail stable, voire deux ou trois, qui ont une maison, se sentent écrasés par le poids constant de l’argent.
Une infirmière m’a écrit après la parution du livre. Elle avait donc un bon travail, mais elle était mal payée. Elle m’a confié qu’elle avait deux enfants, qu’elle avait vécu dans sa voiture pendant une semaine et qu’elle n’aurait jamais pensé voir cette expérience racontée dans un livre. Je pense à sa lettre très souvent. 

Vous avez écrit ce roman pendant la présidence de Donald Trump et il se déroule à la fin de l’ère Obama. L’auriez-vous écrit différemment si vous l’aviez écrit aujourd’hui ? Auriez-vous modifié le moment auquel se déroule le livre ? Le message politique serait-il le même ?

Je ne pense pas que j’aurais changé quoi que ce soit parce que je ne suis pas sûr que la réalité américaine ait beaucoup changé en dix ans. La situation est toujours la même pour les employés et pour les pauvres aux États-Unis.
La date est un détail très ténu à la fin du livre, comme une pensée postérieure à l’écriture. Parce que quand mon livre est paru, en 2021, pendant la présidence de Trump, beaucoup de romans présentaient Trump comme le problème. Sauf que non.
Bien sûr ceux qui sont à la tête du pays contrôlent beaucoup de choses et ça pose question. Mais ce qu’on peut faire à notre niveau, c’est aider les autres au sein de sa propre communauté. 

https://zone-critique.com/critiques/tyriek-white-fantomes-de-brooklyn

Pour moi, le lien entre Abondance et La Route de Cormac McCarthy était évident, malgré les différences entre les deux livres. Je pense à la relation père/fils, au fait qu’ils soient seuls face au monde et sans abri. Était-ce délibéré de votre part ?

Pas du tout. Bien sûr, je l’avais lu, peut-être dix ans plus tôt, mais je n’y avais pas pensé. C’est l’un des auteurs qui a écrit une phrase d’accroche pour Abondance, Mark Doten, qui m’a fait voir les similitudes. Il a écrit « Jakob Guanzon nous offre La route du capitalisme américain ». Ça m’a réjoui mais je n’avais pas vu le parallèle avant. 

Quelles sont vos influences alors ?

J’en ai tellement. Je vais en oublier, mais je mentionne toujours James Baldwin pour ce roman en particulier parce que j’aime la manière dont il est à la fois poétique et politique : pour moi, il a trouvé l’équilibre parfait.
J’aime Nabokov, je lis Kafka. Ce sont les trois auxquels je me rapporte toujours, ainsi que Toni Morrison que j’adore.
Il y a tellement d’auteurs contemporains que je vais oublier… je vais me cantonner aux classiques.
Mais je suis très attiré par les « stylistes », ce qui me vaut d’être critiqué puisqu’on considère mon travail excessif, too much, trop stylisé en fait. Alors que ça me semble juste naturel. 

Je pense pourtant que vous avez réussi à trouver un équilibre parce que votre style reflète le message de votre livre.
D’ailleurs, la traduction française est particulièrement juste et fluide : avez-vous beaucoup échangé avec Charles Bonnot ?

Charles est mon héros. Quand on a vendu le livre aux États-Unis à Greywolf, une petite maison indépendante, les droits n’avaient pas été achetés à l’international. Quand le livre a été nommé pour le National Book Award, Douglas Stuart, l’auteur de Shuggie Bain, a écrit un tweet, et ça a eu un effet boule de neige. Charles m’a écrit un mail, me disant qu’il avait découvert le livre et que l’histoire l’avait beaucoup touché, étant père lui-même. Il m’a demandé s’il pouvait le traduire et bien sûr, j’ai accepté. On a continué à échanger des mails amicaux et puis on s’est rencontrés l’année dernière au festival Le goût des autres, au Havre. On est devenus amis et cette relation m’est très précieuse parce que j’ai étudié la traduction littéraire à Columbia et j’ai énormément de respect pour cet art que j’adore. Et puis le lectorat français a très bien accueilli Abondance et pour moi, c’est grâce à Charles : c’est un artiste à part entière. 

Travaillez-vous sur autre chose ?

J’ai fini un livre il y a deux ans, mais on a dû le mettre de côté parce que la conjecture politique n’était pas vraiment favorable.  Mais ce n’est pas grave parce que j’ai toujours des idées et là, j’ai presque fini un autre roman. Il sera sûrement près dans un mois, et j’espère que nous pourrons vendre les droits, à Greywolf bien sûr, et j’espère à La Croisée.
Mais il faut que je vous prévienne, c’est très différent. Je ne vais pas employer le terme « expérimental », mais c’est spéculatif et le style est très différent, beaucoup plus épuré, mais aussi frénétique en un sens. Je revisite le thème de l’addiction par le prisme de la nostalgie… 

On a hâte !   

Version originale :

I’ve read that the structure of the novel was the first thing that you had in mind. Was it easy to elaborate a story based on this structure?

It was very interesting in the process because the big experiment for me as a writer was to see how money affects the character. I chose the amount of money sort of randomly.
I like to plan my books, to have an idea of where the story is going: I knew the very final sentence of the book before I started. But then comes a point maybe a little more than halfway in the book where I realized Henry has to make some money. He has to take a random job or manual labor. And this interrupted my plan. And so, it just really demonstrated to me how the crush of a small budget really forces a person to do things that they have no want to do, no plan to do. 

Do you think that luck and bad luck play a part in Henry’s life and in people’s life in general? 

Absolutely, even from the day we’re born. The fact that we’re born, but what kind of family we’re born into, what class, what race, what gender, everything, is all luck, chance and coincidences.

Of course, it very much depends on what you do in those situations. Of course, we have free will. However, the amount of free will is very different when we’re born.

Henry is desperate not to repeat his father’s mistakes, especially in the way he raises Junior, but he does, notably in this mix of dignity, love and selflessness he displays. Are we bound to repeat our parents’ mistakes, in the way we raise our children, at least?

Good question. I don’t believe that we are necessarily bound to repeat these, but I think it’s very difficult not to repeat them. We very much internalize the example of our parents. So much of what we know of the world is from our parents or our childhood. If you didn’t have a good example, that is one of the biggest obstacles to overcome if you are determined to be a better person. Because it essentially lies in your nature, and to resist your own nature is difficult. 

If I understand correctly, you think that what we acquire passively weighs more on our life and reactions than what we acquire consciously. 

I think that depends on what we are born with. For example, if we are born with qualities that are accepted in society, then there’s no real struggle to try and overcome this. But however, when we’re born with certain instincts that cause problems, then it becomes very difficult to resist that nature. And so it takes real agency to make these decisions and not to follow this nature, to tell yourself “I’m going to try and do better.” 

Do you think the way Henry and his own father educate their child in this mix of dignity, self-hatred and love for their son, is deeply linked to their Filipino background? 

Good question. I think there are certainly U.S. White, Black and Latino working-class families that are similar, at least partly. But I think how you described it—you described it very well, the Filipino kind of tradition in this book—that specificity was authentic. And so I could really use my own experience to inform the novel. 

The Filipinos are fun people; in general, Filipino culture is happy. But when it comes to the father figure, this is a dominating figure.

What struck me here is the abundance of details you provide about Henry’s environment, its textures and colors, but also about his sensations. Was it the way you found to convey in your writing the discrepancy between the abundance of consumer society and the destitution of Henry and Junior’s day-to-day life?

At 100%. So that’s a very accurate observation on your part. I wanted to write in a quasi-maximalist style to really highlight the sensory overload of this character’s experience. It’s so typical, at least in US literature, when writing about poverty, to write very simply, with sparseness. And I think that’s really beautiful too. Berlin, Raymond Carver, they really capture the scarcity in their prose, which makes sense narratively.
However, I thought it very appropriate to this story because of the materialism of the culture that I was interested in to have the prose reflect this aspect of the experience.  

And so this is why you’ve chosen to make the book begin in a McDonald’s and end in a Walmart? 

Exactly, at least for the Walmart. The McDonald’s, I didn’t think of the symbolism. But I worked at a McDonald’s when I was a boy. Besides, it is where you go for a meal. It was almost like I didn’t think about it because there’s nothing else. We don’t have restaurants or cafes. We have McDonald’s and Burger King. In my very first interview in America, somebody told me that it was brilliant to put McDonald’s and Walmart. I was like, “oh, you’re right, it was brilliant. Yes, it was an accident, but thank you”. 

How does your book relate to people’s current experience in the U.S.? 

I think one of the things that’s difficult for writers early in their career is to conceive who is their audience. I’m doing this for years now, and I still struggle because there is the assumption that readers are at least middle class, educated, etc. However, one of the most inspiring readers’ responses have been from working people who have read the book, who are having very difficult times in their life, and wrote these beautiful messages about seeing themselves in Henry’s experience.

And so much more than any prizes or glory, this is really meaningful to me as a writer. 

So you think that your book reflects what people are living, especially now with the inflation and the economic difficulties America is facing?

In Abundance, it is extreme poverty: we have this in my country naturally. But I think even people who have a steady job, or even maybe two or three jobs, and a home, are crushed by the stress, the constant weight of money.
One of the people who wrote to me told me she is working as a nurse, so she has a good job, but we don’t pay our nurses very well, so she was just saying, “I have two children, and I was living in my car for a week. And I never thought I would see this experience in a book.”
I think of her letter very often. 

You’ve written your novel during Trump’s presidency, and it happens during the end of the Obama era. Do you think that today you would have written it differently? Would you change the dates to which it happens, or anything? Do you think that the political message would be different? 

I don’t think so. And I don’t think the reality in my country has changed very much in the last ten years. It’s a very similar experience for the working and poor in America.

The date is a very subtle detail at the end of the book, like an afterthought in the novel. Because, especially when my book came out in 2021, during the Trump presidency, so many novels are talking about Trump and saying he is the problem. And actually, no. 

Of course, the people in power control a lot. That’s a problem. But what you can actually help with is your community. 

For me, the link with Cormac McCarthy’s Road was pretty obvious, even though there are a lot of differences between the two novels. I think about the relationship between the father and the son, the fact that they are alone against the world and homeless… Was it conscious on your part? 

No, it wasn’t conscious for me. And, of course, I had read it maybe ten years before. But Mark Doten, one of the writers who wrote Abundance’s blurb, wrote, “Jakob Guanzon has given us The Road of American capitalism”. And I was very impressed, happy, but I hadn’t realized this before.

So who are your influences? 

I have so many. I’ll forget somebody, but I always refer to James Baldwin for this book because I love how both poetic and political he is, whereas I think he strikes that perfect balance. 

Besides, I love Nabokov, Kafka. Those are the three I always return to. Toni Morrison as well.

But there’s so many contemporary writers that I will forget somebody. I’ll just stick to old authors.

Actually I’m much more drawn to stylists, which is a problem because my work is criticized as too stylized, too much, excessive. And yet this is just what feels natural to me.

About that, I think precisely that you found a balance in this excess because your style reflects the message of your novel.
By the way, the French translation is pretty accurate and fluid, so I was curious to know if you had a lot of exchanges with Charles Bonnot.

Charles is my hero. When we sold the book in America to a small independent press called Greywolf, there were no international deals. And when the book was nominated for the National Book Award, Douglas Stuart, who wrote Shuggy Bain, he posted one tweet, and then I received an email from Charles Bonnot, just saying how he discovered the book and how it impacted him because he has a son, and this relationship is so powerful. And he asked me if he could translate it. Of course I agreed. 

We have maintained a very friendly email correspondence, but then last year, I finally met him in person for the book festival in Le Havre. We’ve gradually become friends. And I think that relationship is so precious because I studied literary translation at Columbia, and I have so much respect and adoration for the art of translation, and because of how well the French public has responded to the book: it’s Charles. He’s an artist, too. 

And last but not least, are you working on something else? 

I finished a book a little more than two years ago, and we had to shelve it, because it was bad timing politically. But it’s okay, because I always have ideas, and so I have almost finished another novel.
I think it will be ready in one month, and we will sell it, hopefully, to La Croisée and, of course, Greywolf. But I also have to warn readers, it’s very different. It’s… I don’t want to say experimental, but speculative, and written in a much different style, much leaner style, but also very frantic. I revisit addiction, but also within the context of nostalgia.

You’ve made us curious about it!


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