À l’heure où toutes les littératures d’encensoirs nous enfument à longueur de pages avec l’envahissante « absence de Dieu », son « silence » ou, pire encore, son « retrait », – thématique parfaitement hérétique remise au goût du jour, sans penser à mal, par Simone Weil –, Présence de Dieu et Union à Dieu s’avère, littéralement, être un livre intempestif. Deux-cent cinquante pages consacrées à la présence de Dieu. Le dominicain suisse Gilles Émery fit là, sans nul doute, un livre scolaire quelque peu mais salutaire, parmi les pages duquel on redécouvre avec bonheur, avec de vastes respirations lumineuses aussi, la saine et sainte joie du Dieu présent, vivant, triomphant.
« Si Dieu se dérobe, c’est dans sa présence même ».
(H. de Lubac)
Si jeune, je n’ai déjà plus d’oreilles pour le concert clinquant de l’universelle baliverne. L’effort est âpre, pourtant, car les envahissantes vibrations que provoque la presque unanime conspiration des canailles sont incessantes. Dès toujours, certes, mais un peu plus dès hier. Soit que croisse exponentiel, en prévision sans doute des préliminaires déchaînements de l’abîme, devant l’Apocalypse, le nombre des imbéciles ; soit qu’enfle seulement leurs publicités impudiques où, avec plus d’exhaustivité qu’auparavant, s’expose en plein luxe, et tout envahi bientôt. En les deux cas, les suffocations sont un symptôme certain, que l’on ne peut traiter par rien, sinon par l’assourdissement volontaire à tout tumulte de la meute mondaine. « Je suis installé, écrivait Léon Bloy, depuis des lustres, sur un pic intellectuel d’où le grouillement contemporain est à peine discernable ». C’est ainsi, et point autrement, qu’il faut être, du moins si l’on espère pouvoir se refaire vite acoustique à l’essentiel, – cela n’étant possible qu’aux stylites solitaires de l’excellence, pour qui les couinements de ragondins du médiocre ne sont plus même d’imperceptibles acouphènes. Ne lire rien qui soit d’aujourd’hui, d’hier ou même d’avant-hier : telle est, aux temps ultimes, la voie de l’esprit, dont le refuge unique est l’Éternité, la seule et profonde Éternité où son Maître l’excite à L’enquérir. Ne lire rien, pour mieux dire, qui soit temporel, car « ce qu’on prend à la Vérité éternelle pour le donner au Temps consommateur, égoïste et ingrat, le Temps ne le rend jamais et l’a bientôt dévoré » (Barbey d’Aurevilly). Toute personne pour qui ce principe ne paraît point avec évidence est éperdue, et les plus frénétiques apôtres ne seraient pas alors de trop, s’il devait s’agir de lui faire entendre raison.
Cela certes condamne à certaine solitude, qui n’est cependant que l’envers d’une plus haute communion, par-dessus les coquins et par-dessus les gueux, par-dessus les ans et par-dessus les âges, où confèrent les âmes confiantes seulement en leur Principe, et pas surtout en quelques princes incertains de l’Instant. Ceux-là mêmes, et peut-être ceux-là surtout, qui font profession d’Absolu, au sein de sa demeure ecclésiale, donnent à présent tout aux seconds, en croyant exemplairement sacrifier au premier ; et ceux-là, hélas, ce sont la plupart… Le cuistre de sacristie est, de tous, le plus révoltant : en lui, la sottise et l’erreur, d’agaçantes seulement, deviennent blasphématoires exactement. Car entretenir son abrutissement en face de Dieu est un péché que tous s’empressent de clamer véniel afin de pouvoir s’y complaire à toute heure sans craindre le déshonneur ; et rares sont les divorces prononcés entre les modernes confessants du Dieu trinitaire et leur conjugale inappétence aux efforts rationnels. Ainsi vivons-nous désormais le temps où la philosophie, du pinacle de l’intelligence qu’elle partageait jadis avec la théologie, fut abattue par ses pratiquants eux-mêmes et traînée, comme la statue trop fière d’un régime désormais odieux, dans les caniveaux de la cité. Embrenée toute, à présent, on l’apprête de fripes infâmes et l’exhibe à nouveau, déguisée en toutes choses qui ne sont pas elles, et surtout en cet informe machin qui a pour nom l’essai, prétexte au soulagement sale de toutes les vessies vaniteuses de la place publique, lesquelles espèrent, en faisant ainsi flaque, acquérir la réputation d’animal rationnel. Sont désormais sacrés philosophes, dans toutes les sacristies de France et d’Helvétie, d’insignifiants chansonniers dont n’eussent pas même voulu sans doute les plus sordides bastringues de Montmartre, aux temps pourtant les plus glorieux de ce quartier. Essayer est la profession à la mode chez les gens de lettres ; et nul ne rêve plus d’autre chose que de démériter assez devant l’Intelligence afin que d’être adoubé tel. Pour ce, il suffit de prendre plume et de laisser icelle exsuder à propos de quelque objet que ce soit les plus quelconques lignes qui se puissent concevoir : le vulgaire y trouvera sa pitance, et même peut-être la déclarera-t-il plus longue en bouche que la moelle sans substance des Pères grecs & latins réunis. Mais que lui répondre, sinon qu’il devrait prendre la ferme résolution de séquestrer son dégueuloir jusques au moins la consommation des temps ? Et que faire, sinon l’exorciser, autant que faire se peut, par l’exemple de la philosophia perennis, inexorablement brandie dessus la voirie devenue monde ?
Car il ne faut pas moins que saint Thomas d’Aquin pour parvenir à s’abstraire, au milieu même des catholiques, de la bêterie rampante qui ronge tout. Il ne faut pas moins que l’œuvre du Docteur Angélique, dont Léon XIII affirmait que, parmi tous les doctes scolastiques, il « brille d’un éclat sans pareil », celui de « leur prince et maître à tous » ; il ne faut pas moins que cette œuvre qui a, selon les termes d’Innocent VI, « plus que toutes les autres, le droit canon excepté, l’avantage de la propriété des termes, de la mesure dans l’expression, de la vérité des propositions, de telle sorte que ceux qui la possèdent ne sont jamais surpris hors du sentier de la vérité, et que quiconque l’a combattue a toujours été suspect d’erreur » ; il ne faut pas moins qu’elle, donc, pour faire fructifier heureusement l’exil exigé au dedans de soi par l’extérieure et générale catastrophe. Et que l’on prenne bien garde à ceci qu’il n’est pas ici question de préférence personnelle. Point n’est ici question d’opiner ou de n’opiner pas à une option d’étroite pensée. À chacun le droit d’aimer plus ou moins l’apparence de la pensée thomiste, à chacun le droit d’être sensible plutôt à d’autres expressions de la Doctrine ; mais, à tous, le devoir d’en reconnaître l’éminence et d’en admettre l’excellence. C’est par lui donc qu’il convient de se laisser induire au sentiment renouvelé de la présence de Dieu, que d’affreuses hérésies se sont affairées à offusquer aux derniers siècles, et cela jusques hélas en certaines des plus croyantes âmes. Ainsi par exemple de Simone Weil, canonisée presque par certains inconséquents esprits, qui s’avérait pourtant incapable de penser la création du monde hors des structures absurdes où l’esprit s’enferme lorsqu’il accorde crédit au motif archaïque du « retrait de Dieu », – prélude ou épilogue à toutes les divagations vaines dont le XXe siècle fut coutumier lorsqu’il postulait l’absence de Dieu, au prétexte, certes extrêmement impressionnant, de la Seconde Guerre mondiale. Et Simone Weil, donc, de radoter ainsi : « Dieu ne peut aimer en nous que ce consentement à nous retirer pour le laisser passer, comme lui-même, créateur, s’est retiré pour nous laisser être ». Ou encore : « La création est de la part de Dieu un acte non pas d’expansion de soi, mais de retrait, de renoncement ». Et enfin ce blasphème proféré au nom d’une malentente de la kénose, qui ne fut certes pas à elle propre : « Dieu renonce, en un sens, à être tout. […] Dieu s’est vidé de sa divinité ». Dieu créant, c’est Dieu se retirant, Dieu renonçant, Dieu se sacrifiant, déjà, par amour, afin de laisser être ses créatures, et s’avouant ainsi commensurable à ces dernières puisqu’il lui faut, d’une certaine façon, rentrer un peu le ventre pour leur libérer une place au sein de l’existence. Ici, très nettement, création signifie abdication ; et l’on comprend alors que Simone Weil, dont ni la rigueur ni la probité intellectuelle ne peuvent être mises en doute, se soit tenue toute son existence, certes brève, sur le seuil d’une conversion qui lui eût commandé l’abjuration de semblables bêtises. Toute inverse s’avère en effet la doctrine commune de l’Église, qui n’admet aucune concurrence du Créateur et de ses créatures dans l’être. Loin d’être signe de l’absence de Dieu, de son renoncement à quelque plénipotence ontologique fantasmée univoque, la Création ne subsiste que d’être signe de la présence divin. « Toute créature est, par elle-même, une théophanie », écrivait Henri de Lubac dans Sur les chemins de Dieu. « Tout le réel qui s’offre à nous est, par tout lui-même, et d’abord par sa seule existence, le symbole ou le signe de Dieu ». Tout entière, la Création exprime et expose son Créateur, et tient là sa raison d’être, sans quoi le moindre brin d’herbe tomberait au néant ; car exister, déjà et tout simplement, c’est imiter Dieu, à l’infirme proportion de sa nature – et l’imiter, c’est le désigner.
Telle est la grande salvatrice leçon que l’on remémore à la lecture de Présence de Dieu et Union à Dieu, du frère dominicain Gilles Émery, livre austère et scolaire par certains côtés, mais tant aux antipodes des impensantes latrines de l’infralittérature catholique épouse de son temps que son existence seule est prétexte à un embrasement d’espérance : l’on pense encore, parfois, selon l’Éternité, parmi les rangs où le Christ est confessé. Les pages du frère Émery valent beaucoup, non parce qu’elles seraient, en elles-mêmes, un chef d’œuvre de haute prose spéculative, mais parce qu’elles sont un index indiquant, tendu, la droite direction où le regard du lecteur pourra rencontrer le lustre de la sainte Doctrine. Tâche grande parce qu’elle est humble, et noble parce qu’elle est pédagogique. L’honneur de l’Ordre des Précheurs paraît tout entier en de telles études, où l’auteur, plutôt que de consacrer ses facultés au glaçage superficiel d’un thème quelconque, simplement suggéré à son intention par les caprices prétentieux de ses humeurs chaudes, s’offre avec déférence aux exigences de la pensée elle-même qui le presse de se faire, pour les obscurités de ses contemporains, le truchement d’une voix limpide, – celle du maître de son Ordre. Il n’est certes pas prochain, le temps où l’on verra un esprit semblable à celui du frère Émery se compromettre dans la scribouille d’un essai provoqué par une démangeaison fugace, prétexte seulement à tous les espoirs d’immédiate postérité médiatique. C’est ici tout au contraire une entière mythologie qu’il s’agit de montrer telle, cette mythologie de l’absence de Dieu, de son retrait, qui croisse contre l’écorce la plus extérieure du christianisme, comme un lierre strangulatif autour d’un chêne. Et par là, c’est à l’une sans doute des plus complexes questions de la métaphysique chrétienne qu’il s’agit non d’offrir une réponse mais de faire entrevoir au lecteur une voie de résolution possible, question qu’il faut dire, enfin : comment penser sans panthéisme la présence de Dieu au plus intime de toute chose ? Ou à l’inverse : comment penser, sans restreindre l’infinité et la toute-puissance de Dieu, l’existence propre de la Création ? Comment ne point sombrer dément lorsque l’on confesse qu’en Dieu « vivimus, et movemur, et sumus », cependant que la transcendance divine est proclamée absolue, car Dieu « lucem inhabitat inaccessibilem » ? Nulle façon plus efficace que la docilité aux doctrines thomistes pour espérer découvrir quelques lumières en d’aussi obscurs domaines. En la matière, le frère Gilles Émery est un maître. Avec lui, dès lors, je quier en saint Thomas un peu de ce « sentiment de la présence de Dieu », si cher à Paul Claudel.
Je lis donc sous la plume du Docteur commun ceci : « Aussi longtemps, donc, qu’une chose possède l’être, il faut que Dieu lui soit présent (quod Deus adsit ei), selon le mode sur quoi elle possède l’être ». Et pour l’affirmer, la langue latine lui offrait l’usage de ce beau verbe, inexistant par malfortune en français : adesse, littéralement « être-à », et plus communément « être présent, être auprès de ». Verbe qui comportait l’avantage précieux de montrer, à même son étoffe, que cet « auprès de », cette « présence à » n’est rien moins qu’accidentelle, – bien plutôt consubstantielle à l’être dont il s’agit, ici celui de toute créature qui est à Dieu non point de surcroît mais par le simple et seul fait d’exercer, en propre, un acte d’être. Car, « quoi, en effet, de plus présent à chaque chose que son être ? » Rien n’est plus présent à chaque chose que son être, – et cet être, causale, comme l’écrit saint Bernard, c’est Dieu. Non point certes, telle est la tentation panthéiste, que toute chose soit Dieu, ce qui signifierait qu’il est toute chose materiale. Bien plutôt faudrait-il dire que Dieu est au monde qu’il opère, comme l’on dit d’un homme qu’il est à ce qu’il fait, lorsqu’une intense concentration retient son attention sur son ouvrage. Dire cela, cependant, c’est tout dire et ne rien dire ; car dès lors, exactement, commencent en masse à se presser les problèmes sous nos yeux. Tout, en effet, se joue dans l’entente distincte d’une telle présence causale, dont il faut voir surtout, et bien, le caractère superlatif, sans quoi l’on ferait retomber le Dieu trine et transcendant au niveau bien peu digne d’un premier moteur, qui n’est précisément jamais, comme son nom l’indique, que le premier d’entre une série causale dont, au contraire, la pensée chrétienne doit démontrer que Dieu ne lui appartient en aucune façon puisqu’il est Celui par qui toute chaîne causale surgit possible – il est donc Celui en qui tous les premiers moteurs de la Création trouvent leur principe et leur fondement. La suréminence de l’agir créateur, dit « causal » par seule analogie, est cette exigence de pensée à laquelle la Révélation chrétienne convoque l’esprit et l’oblige, envers lui-même tout autant qu’envers Dieu. Le plus proche Principe est toujours le plus lointain, tel est le paradoxe que révèle une rigoureuse pensée de la transcendance divine. Dieu créant, c’est Dieu s’approchant. Dieu absolument outre sa Création, c’est Dieu intimement au dedans d’icelle. De toute évidence, l’acte de création ex nihilo doit donc rendre possible, par sa singularité même, une telle ambivalence. Certes, et saint Thomas ne se prive point de le répéter en maint lieu, le Créateur est en toute chose « sicut agens adest ei in quod agit », mais une telle formule serait vaine si l’accent n’était pas mis sur le « sicut », « comme ». Le Principe est par rapport à ses créatures comme un agent par rapport à ce qu’il cause : incommensurable à quelque agent créé que ce soit, il ne peut être désigné, dans sa vertu causale, qu’en maintenant ensemble l’identité et la différence que toute comparaison comporte. Le monde est l’effet de Dieu, et partant Dieu est cause du monde – soit. Mais ainsi parlant, j’use des compétences analogiques du langage créé, jusques et peut-être surtout dans l’instant même où je désigne le fondement des possibilités expressives analogiques qui me sont échues. Dire en effet que je puis désigner Dieu, analogiquement, à partir de ses effets, parce que tout effet porte en soi une similitude de sa cause, c’est toujours déjà proférer d’analogiques paroles. Et cela paraît de plusieurs façons, – dont une, tout particulièrement, doit être ici examinée.
Cela paraît dans l’effet propre au Principe, qui est l’esse tout entier de toute chose, et non seulement quelque nouvelle configuration d’hylémorphe. Et partant, tel effet n’en a jamais fini, si je puis dire, d’être causé, puisque ce n’est pas seulement une primitive motion qu’il doit à son Principe, mais la totalité de son être. « Manus tuae fecerunt me, et plasmaverunt me totum in circuitu », « Tes mains m’ont fait, et m’ont façonné tout entier ». Si l’on voulait bien ici laisser vibrer l’étymologie de ces termes, l’on pourrait affirmer alors que, littéralement, Dieu ne pro-duit point les choses dans l’être, il les y con-duit ; en ce sens qu’il ne les pousse pas, d’un coup d’un seul, au devant de lui, dans une existence indépendante, mais bien plutôt qu’il demeure, dans l’agir fondamental qu’il leur communique, auprès d’elles, au plus profond d’elles. Dans la différence même qu’implique la note causale, entre l’agent et son effet, se prononce donc non point l’identité, comme le voulut Hegel, mais la présence intime de l’un à l’autre, de ce qui conduit la chose dans l’exercice propre de son esse et de cette chose qui se laisse ainsi porter par le dedans au bon usage de sa propre indépendance ontologique. Ainsi, exister par soi, au sein de la Création, signifie-t-il toujours n’exister que par Dieu, avec Dieu et en Dieu : de cette dépendance absolue – précisément parce qu’elle est absolue : Dieu cause de tout l’être – surgit seulement l’indépendance véritable de toute chose ainsi rendue capable de revendiquer sur son acte d’être un titre de propriété qui ne soit point usurpé. Qu’on en prenne donc toute la mesure : causer, pour le Principe, désigne un acte en quoi la dépendance et l’indépendance de l’effet sont infiniment plus grandes qu’au sein du monde, où toute indépendance se paye d’une proportionnelle distance, et où toute dépendance désigne toujours une aliénation. J’ai dit que l’effet propre de Dieu était de causer l’être de toute chose ; en d’autres termes, de les faire capables, selon un beau mot de Paul Claudel, de « s’exister » et, par là, d’imiter leur Principe, dans l’infime mesure, et infirme, de leur condition ontologique qui n’est pas d’être leur propre existence mais de l’avoir, et plus précisément de l’avoir par participation. Or, de même que, pour reprendre un exemple cher à Thomas d’Aquin, participer du feu c’est, d’une certaine manière, imiter le feu en devenant soi-même ignescent, participer de l’être subsistant, c’est l’imiter à sa mesure en devenant soi-même subsistant – en devenant donc, par la propriété intime de son actus essendi, image et similitude de l’Être même, parfaitement subsistant et parfaitement en acte, Stance absolue d’une vie circumincessante et stable tout à la fois. Par conséquent, cas unique, plus la participation de la créature à l’Être est éminente, plus elle lui permet d’approcher sa subsistance parfaite par soi, – plus, donc, la dépendance est avérée, et plus l’indépendance est manifeste. Dieu paraît alors comme cette « cause » superlative, l’unique Principe, par qui toute chose se reçoit tout entière et, par là même, obtient la vertu de demeurer dans son être aussi longtemps que Dieu demeure en elle.
L’analogie, on le voit, joue ici à plein, dans la mesure où une telle causation n’a point avec la causalité interne à la Création une simple identité mais une certaine proportion seulement qu’indique assez ce caractère absolument unique désigné par la formule « ex nihilo ». Dans la notion de création il est en effet impliqué ceci que tout l’être est causé « a primo principio » et qu’il est, dans le même temps, causé par ce Premier Principe « ex non ente quod est nihil » : toute créature existe, tout à la fois, à partir de Dieu et à partir du néant. La première de ces deux provenances, de significations radicalement différentes l’une de l’autre, porte la similitude qui permet à l’analogie de fonctionner lorsque j’affirme, en empruntant aux relations des créatures, Dieu cause des créatures ; tandis que la seconde de ces provenances, elle, porte la dissemblance, toujours plus grande, par quoi nous avons ici bel et bien affaire à une analogie et non une univocité. Le Principe « cause » comme nulle autre cause créée, laquelle produit son effet toujours à partir d’un néant particulier et, par là, agit dans le genre du changement, cependant que l’acte de création lui est absolument étranger qui se définit comme une relation. Le Principe « cause » sans nul changement, ce qui signifie que la représentation même, tout à fait imaginaire, selon laquelle il y aurait d’abord le néant, puis quelque chose – cette représentation ne correspond strictement à rien : l’être n’est pas après le néant, qui devrait alors être conçu comme une sorte de réserve vide située à côté de Dieu. Réserve qu’il faudrait considérer, à son tour, comme le résultat d’un renoncement de Dieu à être tout, comme l’écrivait Simone Weil. En vérité, de telles fables n’ont aucune pertinence spéculative, et même très vite paraissent nocives à une saine compréhension de la principialité suréminente du Principe, qui cause toute chose dans un tout autre ordre de réalité que le sien.
De là ce fait que Dieu se situe non seulement, bien sûr, au-delà de toute la Création, mais également, point capital, au-delà de la relation que toute créature peut tenir avec lui : tel est le sens de cette célèbre distinction selon quoi la relation du monde à Dieu est une relation réelle, tandis que la relation de Dieu au monde est seulement de raison. Une telle asymétrie dans les relations d’un agent à son effet n’est possible que si cet agent cause ex nihilo, c’est-à-dire non point qu’il transforme un néant préexistant (oxymore) en être, soudain, existant (pléonasme), mais bien plutôt que c’est un ordre de réalité total, et donc totalement autre que le sien, qu’il fait surgir dans l’être, un ordre qui pas même ne relève, comme le croyait Hegel encore, du genre de l’altérité, car à ce dernier appartient une constitutive symétrie : je suis toujours l’autre de mon autre, et inversément. La création ex nihilo indique plutôt une dissymétrie absolue entre cette Cause « de tout l’être » qu’est Dieu, et ses effets, avec lesquels, d’aucune façon, elle n’entre en composition.
Voilà donc préservée la transcendance de Dieu sur l’ensemble de l’ordre des créatures ; mais n’est-ce pas là sacrifier son immanence non seulement en toute chose, mais au plus intime de toute chose, dans les profondeurs silencieuses et fondamentales de chaque existence, laquelle ne persiste qu’à la mesure où Dieu l’inhabite ? De vrai, c’est tout le contraire. Dieu étant analogiquement dit cause du monde, les notes essentielles de toute causalité se trouvent en son acte créateur dans le paradoxe d’une inimaginable suréminence. Ainsi, le Principe étant infiniment plus transcendant à ses effets que toute cause créée, il lui est également, et par le fait même, infiniment plus présent, pour ce que cette présence ne peut être, en aucun cas, considérée comme une composition ou un mélange. De même, donc, qu’un enfant porte en lui la présence permanente et profonde de ses parents, et ce par-delà toute distance, et par-delà même leur décès ou le sien ; de même toute créature porte en elle la présence du Créateur non point comme une absence ou comme une négativité mais bel et bien comme une estampille substantielle dont l’événement le plus intime de son existence, son propre acte d’être, est la première manifestation. « Aussi longtemps, donc, qu’une chose possède l’être, il est nécessaire que Dieu lui soit présent, et cela selon la manière dont elle possède l’être. Or l’être est en chaque chose ce qu’il y a de plus intime et qui pénètre au plus profond, puisqu’il est actualisateur à l’égard de tout ce qui est en elle, nous l’avons montré. Aussi faut-il que Dieu soit en toutes choses, et intimement ». Éminente singularité de la vertu causale divine dont l’effet est, en toute chose, la plus profonde intimité ontologique. Mais c’est là cependant qu’il faut avoir bien conscience, comme je l’ai dit, des conséquences du langage analogique qui, lorsque l’on exprime Dieu, doit être le nôtre, car une telle relation de la Cause à ses effets outrepasse tout ce qu’il nous est donné d’observer parmi le monde où nulle cause, jamais, ne produit un effet si différent d’elle, et dont elle demeure pourtant si proche. À ce prix seulement se comprend que Dieu jamais ne se confonde avec ses créatures, tout en étant in omnibus rebus, et intime, – en toute chose, et intimement. À l’inverse, mais pour les mêmes raisons, Dieu n’a nul besoin de creuser en lui-même l’espace d’existence de ses créatures, car entre elles et lui ne se compose nulle totalité : monde et Dieu n’appartiennent point à un tout qu’ils se devraient alors partager, par l’humble mais absurde excavation de l’Absolu en lui-même. Dieu et le monde sont deux ordres d’existence distincts qui sont « conjoints » par la vertu de Dieu créant les choses dans l’être et les y soutenant, mais telle conjonction, tel contact ne saurait se comprendre comme celui des deux parties d’un même tout. L’un et l’autre ne sont pas côte à côte car leurs relations, pour être mutuelles, n’en sont pas moins radicalement assymétriques. Ainsi l’expose le frère Émery : « affirmer que la relation de création est « réelle » dans les créatures mais « de raison » en Dieu ne signifie absolument pas que Dieu soit indifférent à ses créatures ni que le rapport de Dieu au monde soit une illusion ! Cela signifie plutôt que Dieu n’est pas enrichi par sa relation au monde car Dieu est hors de l’ordre des créatures ». L’action de Dieu, bien réelle, « n’ajoute pas de « plus » à ce qu’est Dieu » (p. 29). L’Absolu est, par rapport au monde, d’un autre ordre ; et c’est toujours en tant que chargé d’une telle différence absolue, ou d’une diversité radicale, pour user plutôt d’un vocable thomiste, qu’il peut être présent en toute créature comme leur Principe et leur Fin.
Lors donc que je répète avec saint Thomas d’Aquin que « Deus est in omnibus rebus […] sicut agens adest ei in quod agit », je dois bien prendre garde de n’oublier jamais que l’agent dont il s’agit est le seul duquel les effets soient par lui posés dans leur propre être, – un être, donc, infiniment divers du sien. Aussi est-ce toujours en tant, seulement, qu’il est imité par l’acte d’être des créatures, que Dieu les insigne de sa présence ; et cela signifie surtout que c’est toujours en tant que divers, dans sa diversité radicale même d’avec le monde, que Dieu s’y trouve présent, puisque c’est en un seul et même acte que les créatures disent leur ressemblance et leur dissemblance avec leur Créateur. Ceci outre tout rapport de négation, ou d’altérité, entendu au sens dialectique hégélien : Dieu n’est pas le non-monde, ni l’autre du monde, car disant ainsi, l’on reconduit toujours ces deux ordres divers, qu’on le veuille ou non, à une certaine forme de communauté entre deux termes ou deux moments d’une seule totalité, fût-elle dialectique et liée donc seulement par la négativité comportée par chacun des deux moments. Chez Hegel, la raison propre de la Nature est d’être le négatif de l’Absolu, et son sens d’être le plus intime est contenu dans le « non » radical qui l’oppose, littéralement, au Logos dont elle procède par délassement, si j’ose ainsi traduire l’Entlassung bien célèbre décrite aux derniers paragraphes de la Science de la Logique. Rien de tel chez Thomas d’Aquin, et plus largement dans la pensée catholique, où le Créateur donne bien plutôt aux créatures d’exister par elles-mêmes à la mesure où elles sont capables d’imiter sa parfaite subsistance par soi. Sa présence en elles est donc positive et non point simplement la trace négative de ce qu’elles ne sont pas : c’est bien par ce qu’elle est qu’un ens creatum manifeste Dieu, et qu’il le manifeste non comme ce que cet étant n’est pas mais comme Celui qui lui donne d’être. La diversité de Dieu et du monde, à même les créatures, se lit en des notes toutes positives, et non point négatives, puisque Dieu jamais ne s’y révèle comme la négation du monde mais bien plutôt comme son plus profond fondement, pure positivité active dont l’image la plus intime est en toute chose, tout à la fois, son acte d’exister et sa subsistance propre. En négligeant la dissymétrie des relations tissées entre le Créateur et sa création, Hegel, à la suite de tant d’autres, n’a pas vu que la formule : « Dieu n’est pas le monde », si l’on entend parler avec exactitude, n’a de sens qu’en un seul sens – celui qui va du monde à Dieu, là où la relation n’est point de seule raison. À l’inverse, la formule : « n’être pas le monde » n’a pour Dieu aucun sens réel : Dieu, par rapport au monde, est outre toute négation, qui est encore une relation mutuellement réelle ; il est à la fois, de manière infinie, et plus présent à sa Création, et plus transcendant. Ce que traduit la notion fondamentale de participation, d’origine platonicienne bien sûr mais remaniée par saint Thomas d’Aquin grâce aux outils spéculatifs sûrs et précis d’Aristote, et par lui donc exprimée en terme d’acte et de puissance. Nulle chose n’est son être mais toute chose a son être, le possède par la grâce d’un donum perfectum fait à elle par Dieu qui veut, en créant, que d’autres que lui puissent participer de sa Gloire, en recevant de lui « l’actualité de tous les actes », l’être, par rapport à quoi tout autre acte (toute autre forme) est, d’une certaine manière, puissance. Parmi la création, tout être signifie dès lors toujours un don, – nul être qui ne soit donné, à chaque instant de son actualité, par la Source archaïque de toute vie.
Ce qui ne veut pas dire que les créatures participent de l’Être même, c’est-à-dire de Dieu, car cela rendrait inutile une pensée de la création ex nihilo, qui ne décrit certes pas un monde réduit à une effluence de substance divine. Entre Dieu et sa Création, il y a l’abîme de cet « ex nihilo », par lequel la consistance propre du créé est rendue possible dont l’être, en tant qu’il est l’effet propre du Créateur, est absolument divers du sien et n’en est pas une simple émanation, au sens néo-platonicien du terme. Le Principe ne se répand pas hors de soi, car « hors de soi » n’a pour lui aucun sens ; et quand bien même une imaginative humaine parviendrait-elle à donner quelque sens à semblable formule, il n’y aurait à telle expansion nulle pensable raison, puisque Dieu est infini et qu’il est par conséquent absurde de lui supposer possible une quelconque dilatation. Le don de l’être, qui rend les créatures participantes de celui-ci, est tout autre chose : il ne donne pas la propre substance de Dieu, il ne donne pas aux créatures d’être sur le mode du « même » mais sur le mode de l’absolue différence d’où seule une véridique, intime et profonde similitude peut surgir. Car pour qu’un étant créé, un « ayant l’être », comme dit Thomas d’Aquin, puisse s’exister selon une véritable ressemblance avec son Créateur, il est absolument nécessaire qu’il soit, pour ainsi dire, celui qui agit son propre acte d’être. Et c’est même par là que se distingue l’effet le plus propre de Dieu qui est, bel et bien, d’offrir à toute créature la capacité de subsister, c’est-à-dire d’exister par elle-même. Tel est le don de l’être : non d’exister par l’esse divin lui-même, mais plutôt d’exister par soi-même grâce à la libéralité miséricordieuse de Celui qui est l’Ipsum esse subsistens et qui permet, par amour, que d’autres que lui jouissent du bonheur intrinsèque de l’être. Ainsi peut se comprendre ceci que, pour saint Thomas, « Il est nécessaire que tout agent soit conjoint à ce en quoi il agit immédiatement, et que cela ait lieu par sa virtus ». Par « virtus » il faut entendre ici ce que le frère Émery propose de traduire par « puissance perfectionnante » et que le Docteur commun définit comme l’achèvement, en elle-même, d’une puissance, sa perfection et, suivant Aristote, « ultimum in re de potentia », le « point ultime de la puissance, dans une chose donnée ». C’est par là que le Principe touche aux créatures, c’est-à-dire par sa puissance active, car, comme l’explique Thomas d’Aquin au même lieu, « virtus talis potentiae nihil est aliud quam ipsa potentia », « la virtus d’une telle puissance n’est rien d’autre que cette puissance elle-même ». Seule cette puissance active de Dieu donne aux créatures de contacter leur Créateur, et par là de pouvoir lui être dites conjointes en un certain sens qui ne soit pas une confusion d’essence, moins encore une juxtaposition : ce n’est que par l’agir créateur, par une puissance achevée, que les étants mondains comportent une présence en eux de leur Origine transcendante dont ils participent non parce qu’il est dans la nature de Dieu de se répandre hors de soi, mais parce que sa volonté parfaitement libre décida, dès les confins de l’éternité, de s’engager dans l’opération d’un monde où pussent resplendir sa Majesté et sa Gloire. « C’est de la plénitude de votre bonté que vos créatures ont reçu l’être », proclamait déjà saint Augustin dans ses Confessions.
Si l’on veut nettement s’exprimer, l’on doit dire alors, avec un texte du Commentaire sur les Sentences, que les créatures participent non de la substance divine mais de sa Bonté : selon ce mode, elles sont conjointes à Dieu « selon une similitude seulement, en tant qu’une certaine similitude de Dieu se trouve dans la créature, mais sans atteindre Dieu selon la substance ; et cette conjonction se trouve dans toutes les créatures, qui sont assimilées à la bonté divine ». Le Principe n’est point, par là, atteint en lui-même, dans sa substance ; et la participation est bel et bien dite selon la divine bonté, et non selon la divine substance.
L’être créé n’est pas une part de l’Être absolu, il en est une similitude, une ressemblance rendue possible par la Miséricorde infinie de cette Éternelle Essence qui, comme l’écrit Dante aux lignes ultimes de son Paradis, « s’est fait / Tant de miroirs où elle se morcèle, / Tout en demeurant Une, ainsi qu’auparavant ». La doctrine de la participation ne signifie certes pas que toute créature prenne une part de la substance divine comme l’on dit des actionnaires de telle grasse société industrielle qu’ils y ont acheté des parts. Il ne s’agit pas de prendre une part à l’Être, mais de prendre part à l’Être, autrement dit de participer à une action que tous, créatures et Créateur, agissent – mais de très différentes façons. Où il y a participation, il y a causalité ; et dans le cas unique de Dieu, cela implique la production d’un effet capable de subsister par soi, d’exercer son propre acte d’être « comme » l’Être même subsistant, au sens précis d’une comparaison analogique où toute ressemblance est toujours outrepassée par une plus grande dissemblance. Cela implique donc ce paradoxe d’une autonomie ontologique tout entière fondée sur une dépendance radicale à son Principe, que dit la notion de création définie par saint Thomas, dans la Summa Contra Gentiles, comme « la dépendance même de l’être créé au Principe par quoi il est établi (dans l’être) ». Dépendance radicale qui, seule, rend possible l’exercice propre de leur acte d’être par chaque créature subsistante : parce que le don parfait de Dieu est total, il donne, pour ainsi parler, toute chose à elle-même, – il lui donne de pouvoir s’appartenir. Sans quoi la création ne pourrait être dite, exactement, un don, la définition de ce terme étant de procurer à celui qui le reçoit la propriété de ce qu’il reçoit. Dans la raison de don sont contenues tout à la fois la suspension totale de l’être-don au donateur ainsi que, à proportion, la propriété du don pour celui qui le reçoit et, dans le présent cas, pour celui qui se reçoit tout entier. Soit un livre reçu d’un ami. Ce livre, certes m’appartient pleinement, sans quoi je ne devrais point dire qu’il me fut donné mais qu’il me fut prêté ; pourtant, dans le même temps, cette propriété dépend absolument de l’acte de cet ami, qui eût pu fort bien se contenter de me le confier pour quelques temps sans me l’offrir, voire de le conserver pour son usage exclusif. De même en va-t-il, toutes proportions analogiques gardées, lorsqu’il est question du donum perfectum de la création.
Comme sont alors lointaines, et insignifiantes, les hérésies étranges de Simone Weil, reconduites par même, au moins une fois, Pierre Boutang, qui allait dans son Apocalypse du désir nommant la Création une « première kénose » divine, sous l’influence d’Urs von Balthasar… Dès lors que Dieu est postulé abstrait de sa Création, la ruée vers l’erreur commence dans le monde des intelligences livrées aux perversions d’une telle hypothèse, gavée bien vite de toutes les facilités où les âmes sans métaphysique s’en vont pacager leurs facultés herbivores. Graduellement s’abolit dans les esprits le grand sentiment du symbolisme des créatures, celui-là même que Léon Bloy désirait de ressusciter au cœur de l’occident terminatif, et que saint Bonaventure résumait d’une formule admirable : creaturæ possunt considerari ut res vel ut signa, « les créatures peuvent être considérées comme choses ou comme signes ». Ce qui signifie que l’on s’y peut soit arrêter, soit au contraire les envisager comme ayant leur raison d’être, toujours, en une incitation à porter plus loin notre regard, vers non pas ce qu’elles sont en tant que livrées à elles-mêmes, mais vers ce qu’elles désignent, – délivrées d’elles seules, si je puis dire. « L’éternel est écrit dans ce qui dure peu ; / Toute l’immensité, sombre, bleue, étoilée, / Traverse l’humble fleur, du penseur contemplée ; / On voit les champs, mais c’est de Dieu qu’on s’éblouit », chantait Victor Hugo dans ses Contemplations.
L’être décline son identité et dit : je suis le désignateur de Dieu, l’index qui toujours pointe vers sa Cause, l’indice permanent du Principe en qui toutes choses furent faites et demeurent. L’être est la provocation de Dieu, sa voix au-devant, cette voix qui vers nous s’avance et l’exprime, l’appelle, l’exige. Alors n’est-il plus temps de gémir sur une fantastique absence du Principe en qui pourtant, les chrétiens les savent bien mais trop souvent l’oublient, toute chose possède vie, mouvement et existence ; mais bien plutôt de proclamer avec Claudel : « Je vous salue, ô monde libéral à mes yeux ! / Je comprends par quoi vous êtes présent. / C’est que l’Eternel est avec vous, et qu’où est la Créature, le créateur ne l’a point quittée. / Je suis en vous et vous êtes à moi et votre possession est la mienne ».
- Présence de Dieu et union à Dieu, Gilles Émery (op.), Parole & Silence, Paris, 2017, 267 p., 22 euros.