Pour s’attarder encore un peu sur la belle année de cinéma qui s’achève, nous avons voulu écrire quelques textes, formuler quelques pensées avant d’accueillir avec enthousiasme les films à venir.
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Miséricorde, Alain Guiraudie
Des morilles qui poussent sur les morts, un curé cul nu, un visiteur fort porté sur la bagatelle : le dernier Guiraudie nous attire à la chasse aux champignons et nous assomme d’un revers derrière la nuque. Polar plouc en forme de farce larzacienne, Miséricorde grince à en éclater. À mourir. Tristan Tailhades
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La Zone d’intérêt, Jonathan Glazer
Pas de hurlements autoritaires, pas de chiens la bave aux lèvres. Une famille dans leur jolie maison, un petit jardin, des fleurs que les fumées d’Auschwitz viennent abreuver. Avec le son seul pour percevoir l’atrocité derrière le mur, Glazer capture l’inconfort qui découle de la banalité : il n’y a pas de monstres, il n’y a que des hommes. Pauline Ciraci
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Dahomey, Mati Diop
Resnais et Marker nous ont montré que les statues meurent aussi. Diop, elle, nous rappelle qu’elles peuvent revenir à la vie. Dans un kaléidoscope d’images décentralisé et ingénieux, la réalisatrice déploie un regard décolonisé, navigant de Paris à Bénin, opérant un passage de l’institutionnalisation vers une multiplicité fulgurante, où l’effervescence populaire s’impose. C’est là, au cœur de cette renaissance, que l’on saisit combien la paralysie du passé n’était qu’une illusion. Diogo Serafim
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Juré n2, Clint Eastwood
Lorsque s’ouvrent les portes du tribunal, c’est toute une machinerie qui s’enclenche. Mais bien vite, les rouages s’enrayent, et c’est la glorieuse Amérique qui s’effondre. Bien éloigné de son dernier faux western testamentaire, Eastwood continue avec une grande sobriété de décortiquer minutieusement les institutions américaines jusqu’à en faire apparaître tous les défauts. Théodore Anglio-Longre
In Water, Hong Sang-Soo
Entre l’insouciance d’un tourisme hédoniste et la rigueur d’un devoir moral, mieux vaut la noyade dans l’immensité de la mer. Bien que souvent associé à l’impressionnisme de Cézanne et Monet, In Water évoque davantage le fauvisme de Derain avec ses couleurs primaires éclatantes et ses compositions épurées. Le flou de l’image, comme un rêve éveillé, nous rappelle que parfois il faut se perdre dans l’indistinct afin d’atteindre l’absolu. Diogo Serafim
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Le Mal n’existe pas, Ryusuke Hamaguchi
Les espaces clos des derniers films de Ryusuke Hamaguchi s’étendent jusqu’à se transformer en une forêt tout de blanc immaculée. La netteté si caractéristique de son cinéma trouve enfin un véritable éclat dans cette nature morte, enneigée, si prompt à l’hypnose. Mais à trop s’endormir, on finit par oublier les troubles qui se cachent dans les fourrés. Théodore Anglio-Longre
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La bête, Bertrand Bonello
La tragédie des destins inexorables. Bonello s’empare de la novella de Henry James sur la paralysie de l’idéalisme pour en moduler un amalgame de genres, où la versatilité mélodramatique de Léa Seydoux s’épanouit dans un affrontement entre l’amour et la peur. Cette tension implose au cœur d’un réseau de motifs récurrents et de rêves anachroniques, où le vertige du désastre devient l’écho d’une humanité suspendue entre désir et renoncement. Diogo Serafim
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Les graines du figuier sauvage, Mohammad Rasoulof
Quand la violence politique fait irruption avec fracas dans l’intimité d’une famille iranienne, tous les repères moraux volent en éclat. Rasoulof transpose avec brio les revendications du mouvement « Femme, Vie, Liberté » dans un thriller psychologique étouffant. Entre la matraque du pouvoir et le désir de liberté, la lutte finale est un éternel recommencement. Sylvain Métafiot
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Los Delincuentes, Rodrigo Moreno
Román et Morán sont dans le même bateau lorsque l’un décide de voler la banque dans laquelle ils sont tous deux employés pour prendre la poudre d’escampette. Le projet est aussi fou que le film. Moreno que l’on connaît à peine en France signe la comédie la plus longue (plus de trois heures) et la plus déjantée de l’année. C’est du pur romanesque dans la filiation de Cervantès et de Borges avec de superbes plans larges sur la pampa. Marthe Statius
Hors Top de la rédac / Here, Bas Devos
C’est la rencontre poétique de deux trentenaires solitaires dans la forêt bruxelloise. Un ouvrier roumain s’ennuie avant de retourner au pays pour l’été. Une chercheuse chinoise scrute les végétaux à travers son microscope. La caméra capture des détails, s’attarde en plans fixes ponctués de bruits à foison. Tout éclot ici et maintenant à qui sait s’attarder loin du vacarme et du tumulte. Un film à regarder comme on observe patiemment la mousse végétale, avec lenteur et délicatesse. Anastasia Marchal
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