La nouvelle pièce de Nathalie Pernette intitulée Wakan – Un souffle, créée l’année dernière, a fait salle comble au théâtre du Châtillon, lors du festival Faits D’hiver organisé par Micadanses. Cette pièce chorégraphique d’une heure et quinze minutes réunit sur scène six danseuses et danseurs. Elle traite des notions du sacré, de la prière, du souffle de vie, de la spiritualité et tente de nous faire traverser un étrange rituel où le mouvement dansé est la voie par laquelle on accède au divin.

Cette pièce constitue une prise de risque intéressante, pour un propos en vogue dans la création contemporaine : le sacré, le religieux, le transcendant. Esprit du temps ou retour du religieux, l’art de la danse semble autant malléable aux questionnements contemporains que n’importe quel autre médium artistique.
Cette pièce constitue une prise de risque intéressante, pour un propos en vogue dans la création contemporaine : le sacré
C’est donc bien évidemment que l’on retrouve dans cette performance des figures du sacré, que ce soit dans le choix des gestes chorégraphiques qui se mêlent aux rituels issus de véritables cultes, dans le choix d’une musique basée sur des voix qui font écho aux chants religieux, ou sur des projections de vitraux de cathédrales. Cependant, ces différentes figures ne permettent pas de justifier l’intérêt de cette performance. La répétitivité des gestes et des prières s’estompent au fur et à mesure que la pièce avance, tant la construction chorégraphique, portée par de beaux interprètes, est lisse et convenue. C’est peut-être pour cette raison que ce spectacle donne l’impression d’avoir traité son sujet sans profondeur. En effet, ce que l’on voit ici, c’est le geste rituel exécuté au travers de motifs chorégraphiques redondants : utilisation quadrillée de l’espace dans lequel les performeurs tracent des lignes et des diagonales, mouvements exécutés sur un rythme binaire et en duo (presque exclusivement), travail de groupe assez peu mis en avant pour un sujet qui pourrait mettre en lumière la force du collectif réuni autour d’un même culte. Tous ces gestes rituels sont finalement banalisés par un cadre formel qui n’a pas su leur trouver de respiration et d’incarnation. On aurait aimé que la chorégraphie puisse servir à ouvrir à un horizon sacré pour, peut-être, transformer la scène en temple et le spectacle en cérémonie. Cependant, quelques moments sortent du lot et justifient l’intention première de la pièce. Par exemple le chant final, qui nous sort de la composition musicale réglée et binaire, et qui donne à ce duo de danseurs un supplément d’âme.
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L’esthétique globale, avec son lot de fumées et de chants religieux, semble être une manière assez obtuse de parler du sacré, presque exclusivement traité sur un mode qui appelle à une certaine gravité et une lourdeur qui n’est jamais vraiment justifiée. La possibilité de la joie dans la communion ou l’Amour ne font pas partie de cette quête de religiosité, et c’est au contraire à une forme de souffrance individuelle face à l’attente d’un signe ou d’une lumière invisible dont il est ici question. C’est un parti pris, peut-être, qui semble pourtant très éloigné des émotions nées des rituels de danse sacrée à travers le monde, où l’extase de la prière est un feu qui brûle pour rassembler les communautés autour d’une même voix, d’une même direction, d’un même souhait.
L’esthétique globale, avec son lot de fumées et de chants religieux, semble être une manière assez obtuse de parler du sacré
Néanmoins, cette pièce facile d’accès, au sujet de départ moulé dans les aspirations contemporaines, trouve, à sa manière, une place dans le monde qui est le nôtre. On peut souhaiter à cette production qu’elle s’exporte dans des formats non-scéniques, dans la rue ou, qui sait, dans une église. C’est d’ailleurs peut-être dans un cadre différent qu’elle trouvera la place qui est la sienne et son souffle propre.
- Crédit photo : © Michel Petit
- Wakan – Un souffle, Nathalie Pernette.
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