Mise en bouche de viennoiserie

Frise Beethoven, Gustav Klimt
Frise Beethoven, Gustav Klimt

La Pinacothèque se plonge jusqu’au 21 juin dans une ambiance viennoise début de siècle. Se vantant d’avoir reçu un bon nombre d’oeuvres du Belvédère, l’un des musées détenant la plus belle collection sécession, et d’être sous le commissariat de son conservateur, nous n’avons ici qu’une petite mise en bouche de ce mouvement qui a marqué la fin du XIXème et le début du XXème siècle à Vienne.

Affiche de l'exposition (Judith, Klimt)
12 février – 21 juin 2015

L’exposition a au moins le mérite de présenter au public français le mouvement Sécession, dérivé viennois de l’art nouveau, époque courte mais ayant marqué profondément la ville, ses artistes et son architecture. Beaucoup moins florale et chargée que l’Art nouveau tel qu’on le conçoit dans le reste de l’Europe, la sécession s’inscrit dans une esthétique plus géométrique se rapprochant presque de l’Art déco des années 20.

Dans une Vienne conservatrice, un groupe d’artistes se forme en 1892 autour de Gustav Klimt pour déconstruire les codes et s’opposer au conformisme de l’époque, lutter contre le nationalisme ambiant en établissant un art international et des échanges avec d’autres artistes européens. Comme l’Art Nouveau, la Sécession se veut être un art total s’intégrant dans la peinture, la sculpture, les Arts décoratifs, l’architecture.

 La Pinacothèque, didactique, débute en nous présentant les oeuvres conformistes et classiques des salons officiels Viennois pour nous faire prendre conscience de l’insolence des sécessionnistes. Les commissaires décident d’enchaîner directement sur l’aspect internationaliste du mouvement avant même d’avoir présenté ses caractéristiques, il aurait été peut être plus judicieux qu’il soit dans l’une des salles de conclusion. Cependant, on ne peut pas leur reprocher de clôturer sur la naissance du mouvement Expressionniste qui sera l’héritier de la Secession, avec comme figure de proue Egon Schiele dont les oeuvres manquent cruellement dans l’exposition. Il est quasiment inconcevable d’imaginer Vienne au temps de la Sécession sans envisager la présentation de plusieurs oeuvres de Schiele, bien que ne faisant pas partie directement du mouvement. Il fut le protégé de Klimt et aurait pu alimenter la section sur la place de la femme, trop pauvre au regard de l’importance du sujet dans la Sécession, se contentant de présenter un seul Von Stuck, la fameuse Judith de Klimt, une simple esquisse de Schiele et un Beardsley, un artiste anglais Art nouveau n’ayant pas de pertinence à être exposé dans une exposition viennoise.

Sans être un incontournable de la saison, cette exposition permet la découverte de ce mouvement si particulier qu’est la Sécession viennoise

Cette lacune pourrait être passée sous silence si par ailleurs la section architecture et art décoratif était plus importante. Un unique recoin de l’exposition est consacré à la description de quelques bâtiments iconiques, sans grande documentation, ce qui est dommage pour un mouvement qui se veut total et une ville ayant gardée plus de traces architecturales que Paris ou Bruxelles. Je ne mentionnerai pas les deux ensembles de chaises et tables et les quelques porcelaines qui constituent les seules traces d’Art décoratif sécession dans l’exposition, trop pauvre pour réellement présenter cet aspect pourtant essentiel.

Trêve de critique, on ne peut qu’applaudir la belle mise en valeur de la reproduction de la fameuse Frise Beethoven de Klimt ornant de la Palais de la Sécession, pièce maîtresse de l’exposition synthétisant le mouvement. Cependant, le manque de mise en situation est regrettable, une petite maquette de l’oeuvre architecturale de Joseph Maria Olbrich ne suffit pas à nous présenter l’écrin qu’offre le Palais de la Sécession à cette frise, manifeste architectural de la Sécession.

 Ces déceptions mises de côté, sans être un incontournable de la saison, cette exposition permet la découverte de ce mouvement si particulier qu’est la Sécession viennoise, mais connaisseurs, passez votre chemin à moins de vouloir (re)voir les Klimt en demeure à Vienne.

  • Au temps de Klimt, la sécession à Vienne, Pinacothèque de Paris, 12 février – 21 juin 2015.

Cassandre Morelle

Broche, Hoffmann
Broche, Hoffmann

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