Tantôt chien

Le désir est une affaire de peau. Peau que l’on étire, peau que l’on caresse, peau contre laquelle on s’incline. La peau de l’autre nous gagne toujours et, face à tout l’empire de ses extensions, on serait prêt à se rendre chien pour accéder au cuir. Notre Dimanche Rose prend la forme d’un double poème incandescent, composé par Théo Perrache.

Tantôt chien

Tantôt chien
Tantôt diamant
J’habite en alternance chaque répit de tes milliards de va-et-vient
Tu balayes dans chaque coup de reins la chienne poignée de rien qui coupe mes souffles
Poignée de chien sur ma gorge
Poignée de terre modelée au gré de tes mains
Je suis marmite
Je suis manche
Je suis fève
Tu émailles chaque écorce perdue
Tu fais briller chaque écaille pleurée
Tu fais couler une rivière qui se laisse déborder tant elle sait qu’elle regagne son lit
Tu cueilles dans le fond de moi l’étincelle solide d’un diamant noyé
Tu tamises des litres de moi
Tu bois des litres d’or liquide
Tu écoutes des litres de prières adressées au vide
Tu déballes des montagnes de cadeaux jamais ouverts
Tu pigmentes chaque poudre de chaque cristal de chaque porcelaine brisée

Cuir(e)

Ma langue est un pinceau
Elle ouvre sur ton ventre un océan de salives possibilités
Je dessine un slip sur la membrane transparente
Je surligne sa couture avec les dents
Ton slip hurle
Il a le parfum du lait
J’en arrache un morceau
Pour tapisser l’intérieur de moi de son odeur blanche

J’ai pas assez de mains pour toute ta peau
J’ai pas assez de lèvres

Nervures
Écailles
Coquillages cassés
Fragment de moi sous tes ongles
Fragment de toi sous ma dent

J’ai mangé ta beauté
Grain après grain sur l’assiette de ton dos criblé
J’ai goûté chaque constellation
J’ai buté sur chaque énigme de la carte
J’ai ramassé chaque frisson avec la pulpe de mes deux doigts
Je les ai garnis avec toutes les fleurs de ma peau
J’ai respiré à travers chaque alvéole de tes soupirs

J’ai écrit l’amour sur ta peau

Tu as encore
Tatoué dans le cou
Mon souffle